Youcat, Dico Catho,… et Action Catholique : un excellent cocktail pour les jeunes


Dans un article récent sur son blog, Jean-Marie Guénois, rédacteur en chef adjoint chargé des religions du Figaro, analysait le programme de réforme de l’Eglise entrepris par Benoît XVI. Le journaliste écrivait notamment que le pape « remet à l’heure les pendules doctrinales dans l’Eglise catholique. Et siffle la fin d’une certaine « récréation doctrinale » où tout et son contraire était possible dans la grande maison catholique ». Jusque là, pas de problème, je suis d’accord avec Jean-Marie Guénois. C’est dans le déploiement de cette idée (que le journaliste-blogueur du Figaro ne fais pas directement dans son billet), que ça dérape vite… En effet, comme preuve de ce changement de ton, on cite souvent la mise en avant des catéchismes, que ce soit le CEC (Le Catéchisme de l’Eglise Catholique comme on a l’habitude de le nommer) ou encore le nouveau catéchisme pour les jeunes qui a été publié à l’occasion des JMJ, le Youcat !

On sent poindre, dans ces remarques, la crainte que ces catéchismes signent la fin de « l’esprit du concile » et qu’ils aient tendance, selon ceux qui les dénoncent, à nous faire rentrer dans une période pré-conciliaire (vous savez, l’époque durant laquelle des prêtres et des religieuses sévères et intransigeants obligeaient les enfants à apprendre et à réciter par cœur leur petit catéchisme). Ce serait la fin de l’âge d’or de la réflexion, et on sent poindre dans les tenants de ce discours la crainte que les chrétiens ne deviennent des espèces d’automates sans pensée, télécommandés depuis Rome ou d’autres lieux…

Oui, je sais, vous allez me dire que je vais vite en besogne et que je noircis le tableau. N’empêche que souvent, la remise en question de « l’esprit du concile » va souvent de pair avec cette idée. Et d’ailleurs Jean-Marie Guénois, dans son article écrit : « Bref, l’idée majeure, l’axe politique pourrait-on dire de ce document [la note de la CDF pour l’année de la foi, NDR], est de réaliser un « approfondissement de la doctrine catholique » et de « s’engager dans la nouvelle évangélisation par une adhésion plus ferme au Seigneur Jésus » ».

Pourtant, à côtoyer quelques jeunes adultes et trentenaires, il me semble qu’ils refuseraient fermement d’entrer dans cette définition. Leur foi, comme les jeunes des années 60 et 70, ils veulent la vivre ! Ils veulent en témoigner en se mettant au service de l’humanité. Mais ils veulent savoir pourquoi ils le font ! Voilà peut-être ce qui explique leur attrait pour les catéchismes et Dico Catho. Voilà pourquoi ils se retrouvent pour échanger et se former autour de la Doctrine sociale de l’Eglise, dans des parcours Alpha ou des groupes Youcat. Voilà pourquoi des livres comme le Dico Catho, sorti cette année, ont autant de succès et se trouvent sur les étals de la Fnac et autres grandes enseignes.

Car à la différence de leurs ancêtres, les membres de la génération Y ont perdu le contact avec les bases de la foi (ou plutôt, il ne l’ont jamais eu comme l’ont eu leurs parents). Certains sont de nouveaux convertis et n’ont pas eu de catéchisme pour les imprégner. D’autres ont eu droit à une catéchèse qui, malheureusement, a plus insisté sur un impératif moral que sur les bases de la foi. Je ne juge personne en faisant ce constat, mais force est de constater que les jeunes adultes ne veulent justement pas être les automates de certaines idées (y compris des plus nobles idéaux), mais qu’ils cherchent à vivre ce qu’ils croient, à « rendre compte de l’espérance qui est en eux » pour paraphraser la première lettre de Pierre. C’est dans ce cadre qu’ils utilisent les outils que sont les catéchismes et autres documents du genre. Pour décider, ensuite, en pleine connaissance de cause, quel sera leur engagement.

En fait, si l’on pousse un peu la logique, on pourrait presque affirmer que ces jeunes sont les vrais héritiers de l’action catholique. Le slogan du mouvement emblématique de cette mouvance, la JOC, est « Voir, Juger, Agir ». La curiosité des jeunes dans le monde contemporains, face à toutes les évolutions actuelles, ne peut certainement pas être remise en cause. Le Voir, c’est donc possible. C’est pour le Juger que ça se complique, car pour juger, il faut des éléments, des bases ; C’est ce que ces méthodes qui paraissent anciennes apportent aujourd’hui. Un recours aux références objectives. A partir de là, l’Agir n’est plus loin…

Alors oui, je suis persuadé que l’utilisation des catéchismes et la remise à l’heure des pendules doctrinales dans l’Eglise est gage de fécondité pour « l’Esprit du concile »…

9 commentaires

  1. « Certains sont de nouveaux convertis et n’ont pas eu de catéchisme pour les imprégner. D’autres ont eu droit à une catéchèse qui, malheureusement, a plus insisté sur un impératif moral que sur les bases de la foi. »

    D’autres enfin ne se rappellent avoir passé leurs lointaines années de catéchisme à faire des travaux manuels (moches au demeurant), à mimer l’évangile, sans avoir jamais eu de vraies bases solides. Et ils n’ont pas forcément envie que leurs enfants subissent la même chose…

  2. Le rapprochement avec l’action catholique est audacieux, compte tenu des tonnes de suspicions qui règnent entre ceux qui regrettent la splendeur passée de l’AC et ceux qui espèrent que la page sera prochainement tournée. Audacieux, mais surtout intéressant : revenir à la source de l’AC comme vous le faites ne peut que nous aider à aller plus loin en nous appuyant sur ce qui reste – et restera – une très belle expérience.
    Merci !

  3. Je voudrais répondre à Goéland que les enfants du caté ont eu une pédagogie adaptée à leur âge. Et bien sûr, s’ils ont décroché, le caté de leur enfance ne répond plus à leurs questions d’adolescent ou d’adultes. Cela ne veut pas dire qu’il faut le mépriser. Quand nous éveillons des petits à la foi, nous ne leur enseignons pas de la haute théologie. Nous nous efforçons de nous adapter à leur âge au fur et à mesure qu’ils avancent dans la vie

    • Cher père Jean, je suis d’accord avec vous, mais étant moi même un produit de certains cours de caté un peu « légers » (et je reconnais même en avoir fait certains dans mes jeunes années de ministère), je déplore à certains moments des cours humainement valables, mais au contenu de foi trop « suggéré » et pas assez affirmé. Du coup, l’ensemble est un peu discrédité… Cela étant dit, je vous avoue ne pas trop savoir comment faire pour monter un programme de caté adapté aux enfants qui soit plus péchu sur le contenu (et je suis dans un diocèse concordataire, où l’enseignement religieux à l’école ne facilite pas forcément tout…)

  4. @ Vieil imbécile : Le rapprochement n’est pas audacieux pour moi, il est justement le cœur et le sens dune réflexion qui m’anime personnellement depuis un bon moment : je crois de plus en plus (comme Stéphane, visiblement, et cette concordance me réjouit) qu’il y a une proximité forte entre les intuitions de la JOC et celles qui motivent beaucoup de jeunes aujourd’hui. Si les choix posés semblent s’opposer dans la forme (et encore, ça mériterait d’être creusé), il y a au départ – me semble-t-il – une même volonté de penser la foi par eux-mêmes et de l’adapter à leur temps et à ce qu’ils perçoivent comme les urgences et les exigences du moment. Le contexte a beaucoup évolué, et évidemment l’expérience passée finit par donner le sentiment que c’est un « retour de balancier », mais je ne pense pas. Au-delà de l’apparente radicalité du changement (du « retour » ?), et là encore ce n’est que mon humble avis, il n’y a qu’un seul et même mouvement. Mais Dieu n’écrit pas des lignes droites, comme on le sait bien…
    (J’y pense, j’y pense, mais il faudrait vraiment que je me mette un de ces jours à un billet sur le sujet, en fait…)

    @ Père Jean : Ne dénigrons pas le catéchisme qui a fait de nous, malgré tout… des chrétiens ! Mais je rejoins un peu Goéland et Lemessin là-dessus : le catéchisme que j’ai moi-même suivi me laisse un peu le même sentiment. Ce qui ne veut pas dire qu’il a été totalement mauvais, mais un regard critique sur un certain nombre de ses limites n’est-il pas essentiel ?

  5. @Edmond Rien à redire, mon « audace » visait plus une opposition – que j’intuite artificielle – de deux générations qu’une réalité. Et je suis très heureux que la génération suivante soit animée par une telle réflexion ! Je vois que je ne suis pas seul à attendre le billet ; j’en demande plus, alors : le livre ! 😀

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